Ci-gît la démocratie.
Je viens de lire ce commentaire de Mark Steyn sur la visite de Bush en Europe, qui se conclut par: "ce soir, nous portons nos toasts à la mort d'une idée: l'Ouest".
Mark Steyn n'a pas tort: l'Ouest est mort. Les tentatives désespérées des Etats-Unis pour maintenir l'Ouest en vie, en agitant le spectre d'Al Qaeda, de la tyrannie dans le monde arabe, en Chine ou ailleurs, sont donc un peu ridicules. Car enfin, l'Ouest est mort il y a 15 ans déjà, en même temps que son pire ennemi, l'Est. Non seulement le cadavre de l'Ouest ne sera ressuscité, mais il est même grand temps de l'enterrer car il commence sérieusement à grouiller d'asticots.
L'Ouest était un mot codé pour désigner les démocraties occidentales, toutes plus ou moins membres de l'OTAN, en fait les Etats-Unis et l'Europe de l'Ouest. L'Ouest et l'Est sont nés en 1945 à Yalta, lorsque les super-puissances de l'époque se partagèrent l'Europe et le Monde.
A l'Est, le communisme stalinien, qui dégénéra en communisme sclérosé puis en communisme moribond. Dès les années 80, les vieillards leaders de l'URSS (qui se souvient du bondissant Brejnev, de l'inénarrable Tchernenko et du jovial Andropov?) étaient en meilleure santé que le système qu'ils dirigeaient. Gorbatchev, arrivé au pouvoir en 1985, crût pouvoir rajeunir le mourant. Seulement, à 68 ans, il est un peu tard pour se mettre au jogging.
A l'Ouest, la démocratie, disons libérale aux Etats-Unis et sociale en Europe. Un système fait d'élections "libres" (pas trop truquées et avec une chance raisonnable pour le commun des mortels de pouvoir y voter et s'y présenter et de se prétendre ainsi citoyen ou politicien), de partis politiques (financés par les grandes entreprises aux Etats-Unis et par les états en Europe), de libertés encadrées par la loi de la majorité.
Il résulta de cet équilibre des super-puissances une raison pour chaque bloc de se maintenir et de se développer.
Je doute que l'Est aurait pu prolonger son agonie si longtemps s'il n'y avait eu une perspective de guerre avec l'Ouest. Vers 1985 (année ou j'obtenai mon bac), je me souviens avoir vu un reportage sur l'URSS. C'était une espèce de micro-trottoir géant en Russie, qui avait demandé moult autorisations officielles pour être réalisé, et je fus surpris d'une chose: les citoyens soviétiques, pris au hasard dans la rue en train de faire leur marché, voulaient la paix et croyaient que c'étaient les Américains les méchants qui voulaient les attaquer. Le ver était déjà dans le fruit: malgré la menace impérialiste, les soviétiques continuaient à faire leur marché.
De l'autre côté, à l'Ouest, combien de fois la menace des chars soviétiques à Paris n'a-t-elle pas été brandie? J'ai encore un livre humoristique publié en 1984, sorte de petit guide à l'usage des collaborateurs avec l'occupation de l'Armée Rouge, qui serait forcément différente de l'occupation allemande et pour laquelle les Français, spécialistes de la collaboration, ne pourraient évidemment pas appliquer leurs vieilles recettes. Dans ma ville, les communistes du PCF avaient pour habitude de truquer les élections afin de se maintenir au pouvoir. Les décennies 60, 70 et 80 marquèrent pour la France une forte progression de l'influence de l'état en matière économique. Ne fallait-il pas accroître le pouvoir de l'état, seul garant de la démocratie? Les partis politiques et syndicats français purent enfin brasser les millions de francs versés par l'état, "pour promouvoir le pluralisme politique essentiel à la démocratie".
Dans les années 1980, Reagan et sa "révolution conservatrice" renforcèrent l'emprise de l'état sur la société civile (en lançant la "guerre contre la drogue" par exemple), tout en "libéralisant" l'économie (en fait, elle se libéra toute seule lorsque Reagan diminua les impôts). Les partis politiques américains pouvaient enfin brasser les millions de dollars que les entreprises leur versaient, en échange de menus services une fois arrivés au pouvoir.
A l'Ouest, les étatistes avaient augmenté le débit de leurs pompes à phynances et c'est bien cela qui compte finalement.
En 1990-91, l'Est s'effondre. Logiquement, il aurait fallu achever l'Ouest tout de suite. L'état démocratique n'est alors plus nécessaire et nous aurions pu fort bien nous en passer. Mais, les gouvernements agitent alors de nouveaux épouvantails. Sinon, il y avait un risque réel que les citoyens finissent par ouvrir les yeux sur la corruption massive de leurs états "démocratiques", qui s'incarne si bien dans la trinité trafic d'armes, trafic de drogue et trafic d'influence.
De ce point de vue, il faut bien reconnaître que George W. Bush est un génie. Avoir réussi à transformer quelques centaines d'agités religieux, armés de cutters et de kalashnikov, en "danger pour la démocratie et la liberté" alors qu'ils causent moins de morts que les voitures ou les hamburgers, il fallait quand même le faire. Après avoir triomphé des millions de soldats des hordes communistes, équipées d'armes de destruction massive, voilà que la démocratie est mise en danger par quelques pachtouns faméliques et quelques Arabes illuminés! Vite, aux armes citoyens, formez vos bataillons et dépèchez-vous un peu de servir de chair à canon en Afghanistan, en Irak et dans toute la région.
Mais tout le monde ne le suit pas dans cette nouvelle croisade. La division entre démocratie "libérale" (au service des grandes entreprises contributrices des partis politiques) et démocratie "sociale" (au service du socialisme) se révèle. En Europe, le nouvel épouvantail brandi par les étatistes pour conserveur leur pouvoir a pour nom "inégalités", "chômage", "précarité", "OGM". Et pour terrasser ce nouveau danger, il faut l'euro et la constitution européenne, qui sont les chefs-d'oeuvre de la démocratie européenne: une institutionnalisation des techniques de corruption de l'état démocratique.
Ne nous y trompons pas, ces deux épouvantails ont été fabriqués par ceux-là mêmes qui s'en servent.
Aux Etats-Unis, si le gouvernement américain n'était pas, depuis des années, une extension du pouvoir pétrolier, le 11 septembre 2001 n'aurait pas eu lieu.
En Europe, si les socialistes ne ponctionnaient pas dans les poches des citoyens 40% de ce qu'ils gagnent (en moyenne), le chômage, la précarité et les inégalités n'existeraient pas et les entreprises n'auraient pas besoin de booster leur productivité comme elles tentent de le faire.
Pour ma part, je veux porter un toast à la mort d'une idée: la "démocratie occidentale". En tuant la poule aux oeufs d'or qui la nourrissait, elle s'est tuée elle-même.
Mais l'agonie ne fait que commencer.
Mark Steyn n'a pas tort: l'Ouest est mort. Les tentatives désespérées des Etats-Unis pour maintenir l'Ouest en vie, en agitant le spectre d'Al Qaeda, de la tyrannie dans le monde arabe, en Chine ou ailleurs, sont donc un peu ridicules. Car enfin, l'Ouest est mort il y a 15 ans déjà, en même temps que son pire ennemi, l'Est. Non seulement le cadavre de l'Ouest ne sera ressuscité, mais il est même grand temps de l'enterrer car il commence sérieusement à grouiller d'asticots.
L'Ouest était un mot codé pour désigner les démocraties occidentales, toutes plus ou moins membres de l'OTAN, en fait les Etats-Unis et l'Europe de l'Ouest. L'Ouest et l'Est sont nés en 1945 à Yalta, lorsque les super-puissances de l'époque se partagèrent l'Europe et le Monde.
A l'Est, le communisme stalinien, qui dégénéra en communisme sclérosé puis en communisme moribond. Dès les années 80, les vieillards leaders de l'URSS (qui se souvient du bondissant Brejnev, de l'inénarrable Tchernenko et du jovial Andropov?) étaient en meilleure santé que le système qu'ils dirigeaient. Gorbatchev, arrivé au pouvoir en 1985, crût pouvoir rajeunir le mourant. Seulement, à 68 ans, il est un peu tard pour se mettre au jogging.
A l'Ouest, la démocratie, disons libérale aux Etats-Unis et sociale en Europe. Un système fait d'élections "libres" (pas trop truquées et avec une chance raisonnable pour le commun des mortels de pouvoir y voter et s'y présenter et de se prétendre ainsi citoyen ou politicien), de partis politiques (financés par les grandes entreprises aux Etats-Unis et par les états en Europe), de libertés encadrées par la loi de la majorité.
Il résulta de cet équilibre des super-puissances une raison pour chaque bloc de se maintenir et de se développer.
Je doute que l'Est aurait pu prolonger son agonie si longtemps s'il n'y avait eu une perspective de guerre avec l'Ouest. Vers 1985 (année ou j'obtenai mon bac), je me souviens avoir vu un reportage sur l'URSS. C'était une espèce de micro-trottoir géant en Russie, qui avait demandé moult autorisations officielles pour être réalisé, et je fus surpris d'une chose: les citoyens soviétiques, pris au hasard dans la rue en train de faire leur marché, voulaient la paix et croyaient que c'étaient les Américains les méchants qui voulaient les attaquer. Le ver était déjà dans le fruit: malgré la menace impérialiste, les soviétiques continuaient à faire leur marché.
De l'autre côté, à l'Ouest, combien de fois la menace des chars soviétiques à Paris n'a-t-elle pas été brandie? J'ai encore un livre humoristique publié en 1984, sorte de petit guide à l'usage des collaborateurs avec l'occupation de l'Armée Rouge, qui serait forcément différente de l'occupation allemande et pour laquelle les Français, spécialistes de la collaboration, ne pourraient évidemment pas appliquer leurs vieilles recettes. Dans ma ville, les communistes du PCF avaient pour habitude de truquer les élections afin de se maintenir au pouvoir. Les décennies 60, 70 et 80 marquèrent pour la France une forte progression de l'influence de l'état en matière économique. Ne fallait-il pas accroître le pouvoir de l'état, seul garant de la démocratie? Les partis politiques et syndicats français purent enfin brasser les millions de francs versés par l'état, "pour promouvoir le pluralisme politique essentiel à la démocratie".
Dans les années 1980, Reagan et sa "révolution conservatrice" renforcèrent l'emprise de l'état sur la société civile (en lançant la "guerre contre la drogue" par exemple), tout en "libéralisant" l'économie (en fait, elle se libéra toute seule lorsque Reagan diminua les impôts). Les partis politiques américains pouvaient enfin brasser les millions de dollars que les entreprises leur versaient, en échange de menus services une fois arrivés au pouvoir.
A l'Ouest, les étatistes avaient augmenté le débit de leurs pompes à phynances et c'est bien cela qui compte finalement.
En 1990-91, l'Est s'effondre. Logiquement, il aurait fallu achever l'Ouest tout de suite. L'état démocratique n'est alors plus nécessaire et nous aurions pu fort bien nous en passer. Mais, les gouvernements agitent alors de nouveaux épouvantails. Sinon, il y avait un risque réel que les citoyens finissent par ouvrir les yeux sur la corruption massive de leurs états "démocratiques", qui s'incarne si bien dans la trinité trafic d'armes, trafic de drogue et trafic d'influence.
De ce point de vue, il faut bien reconnaître que George W. Bush est un génie. Avoir réussi à transformer quelques centaines d'agités religieux, armés de cutters et de kalashnikov, en "danger pour la démocratie et la liberté" alors qu'ils causent moins de morts que les voitures ou les hamburgers, il fallait quand même le faire. Après avoir triomphé des millions de soldats des hordes communistes, équipées d'armes de destruction massive, voilà que la démocratie est mise en danger par quelques pachtouns faméliques et quelques Arabes illuminés! Vite, aux armes citoyens, formez vos bataillons et dépèchez-vous un peu de servir de chair à canon en Afghanistan, en Irak et dans toute la région.
Mais tout le monde ne le suit pas dans cette nouvelle croisade. La division entre démocratie "libérale" (au service des grandes entreprises contributrices des partis politiques) et démocratie "sociale" (au service du socialisme) se révèle. En Europe, le nouvel épouvantail brandi par les étatistes pour conserveur leur pouvoir a pour nom "inégalités", "chômage", "précarité", "OGM". Et pour terrasser ce nouveau danger, il faut l'euro et la constitution européenne, qui sont les chefs-d'oeuvre de la démocratie européenne: une institutionnalisation des techniques de corruption de l'état démocratique.
Ne nous y trompons pas, ces deux épouvantails ont été fabriqués par ceux-là mêmes qui s'en servent.
Aux Etats-Unis, si le gouvernement américain n'était pas, depuis des années, une extension du pouvoir pétrolier, le 11 septembre 2001 n'aurait pas eu lieu.
En Europe, si les socialistes ne ponctionnaient pas dans les poches des citoyens 40% de ce qu'ils gagnent (en moyenne), le chômage, la précarité et les inégalités n'existeraient pas et les entreprises n'auraient pas besoin de booster leur productivité comme elles tentent de le faire.
Pour ma part, je veux porter un toast à la mort d'une idée: la "démocratie occidentale". En tuant la poule aux oeufs d'or qui la nourrissait, elle s'est tuée elle-même.
Mais l'agonie ne fait que commencer.
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